Journée
d'étude
"Lobservation
historique du travail administratif.
LEtat et les étrangers au 20ème siècle."
7 février 2007, Toulouse
Journée d'étude organisée par le GRHISPO/AFSP avec le soutien du LaSSP
Lieu : IEP de Toulouse - Salle du Conseil De 9h00 à 17h30 -
Ces dernières années, les hauts fonctionnaires, comme les fonctionnaires de base (les " street-level bureaucrats " de Michael Lispky), ou encore les experts de et dans lÉtat, ont fait lobjet de nombreux travaux en science politique. Plusieurs recherches ont également porté sur ladministration au 19e siècle dans une perspective historique ou socio-historique. Tout récemment, un ouvrage de synthèse et de prospective a proposé de développer une sociologie politique comparée de ladministration, notamment en défrichant certaines zones de lEtat encore à explorer (certains corps dinspection, ladministration territoriale, les autorités administratives indépendantes ou les agences) (Dreyfus et Eymeri, 2006) ; mais peu de contributions ont porté sur le travail concret des agents de lÉtat, et une seule dentre elles a employé le terme " travail " dans son titre. Lobjectif de cette journée est précisément de revenir sur les enjeux méthodologiques dune observation intensive du travail des fonctionnaires ou, plus largement, dacteurs sociaux en position de représenter lEtat ou ladministration, et dagir en leur nom.
La notion de " travail " met laccent sur lactivité concrète des acteurs sociaux, sur leurs pratiques, en partie discursives (tout particulièrement dans les mondes de ladministration) mais pas seulement. La socio-histoire du politique sest largement définie par une attention portée aux propriétés sociales, aux liens dappartenance (aux institutions, au sens durkheimien du terme) et aux pratiques des acteurs, afin de mieux rendre compte des logiques par lesquels les institutions agissent. Le " travail administratif ", ici, désigne donc le travail dacteurs administratifs, qui, dans leurs activités concrètes, depuis la production de circulaires à linspection dun établissement, en passant par la compulsion de dossiers ou la réception dusagers au guichet, font advenir telle ou telle " politique " de lÉtat. Pour éviter le risque dune trop grande dispersion, nous avons choisi dinviter des chercheurs dont lobjet détude appartient au même " domaine daction " de lÉtat, et qui partagent, nous semble-t-il du moins, une adhésion aux principes dune sociologie de type constructiviste et historique. F. de Barros, C. Hmed, S. Laurens et A. Spire ont tous travaillé sur les politiques de lÉtat à légard des étrangers et/ou des immigrés, mais dans perspectives et des périodes différentes, qui leur donnent accès à différents types de fractions de lEtat ou des institutions publiques, et à différentes figures de fonctionnaires.
" Observation intensive " : lexpression suggère sans doute le recours à la méthode ethnographique, à limmersion de longue durée dun observateur dans un milieu quil constitue en " terrain ". Y participe aussi, mais de manière plus problématique, la pratique de lentretien semi-directif avec les acteurs eux-mêmes, très courante dans lanalyse des politiques publiques. Mais lobservation intensive peut aussi être rapportée à la recherche historique : laccès à des documents darchives permet de reconstituer des pratiques, y compris des pratiques que lanalyste de processus actuels ne peut observer parce quil ny a pas accès. Une ethnographie historique de ladministration au 20e siècle est-elle possible, et si oui, à quelles conditions et avec quelles limites ? Lintérêt du GRHISPO, ici, est dordre méthodologique : on souhaite interroger le rapport de la recherche (sur ladministration) à ses sources (archivistiques, mais pas seulement), dans la tradition des travaux en sciences sociales et en histoire pour lesquels il importe de réfléchir aux logiques de production des sources et aux modalités de leur mobilisation, depuis leur transformation en corpus et leur mise en série jusquà la mise en question des catégories dont elles sont porteuses.
Une double consigne, donc, est proposée aux intervenants : caractériser le travail administratif des représentants de lÉtat face aux étrangers, ou dans les politiques de limmigration, donc aussi leurs manières dagir au nom de lÉtat et, ce faisant, de faire agir lÉtat ; revenir de manière réflexive sur les sources mobilisées dans lactivité scientifique de dobjectivation du travail de lÉtat.
Les intervenants :
Françoise de Barros,
" Observer le travail administratif au local : les acteurs municipaux aux prises avec la catégorie d'étranger 1919-1984".
Maîtresse de conférences en sociologie à luniversité de Paris 8, Françoise de Barros est lauteur dune thèse en science politique (2004) intitulée " LEtat au prisme des municipalités. Une comparaison historique des catégorisations des étrangers en France 1919-1984 ".
Alexis Spire,
" Regards croisés sur le travail bureaucratique des agents chargés du contrôle de limmigration "
Chargé de recherches en sociologie au CNRS-CERAPS, Alexis Spire est lauteur de Etrangers à la carte. Ladministration de limmigration en France (1945-1975), Grasset, 2005 (daprès sa thèse " Sociologie historique des pratiques administratives à légard des étrangers en France 1945-1975 ", 2003).
Choukri Hmed,
" Pour la socio-histoire des pratiques dencadrement des étrangers "isolés" dans les foyers Sonacotra (1960-1990) : enjeux méthodologiques et construction dobjet "
Agrégé préparateur en sociologie à lENS (Ulm), Choukri Hmed est docteur en science politique de luniversité Paris 1, membre du CMH et du CRPS. Il est lauteur dune thèse intitulée " Loger les étrangers "isolés" en France. Socio-histoire dune institution dEtat : la Sonacotra (1956-2006) " (2006).
Sylvain Laurens,
" Quelle place pour le doute dans le travail administratif ? Eléments de méthodologie pour une utilisation socio-historique des post-it et autres mots griffonnés dans lentresoi bureaucratique "
Docteur de lEHESS, Sylvain Laurens est lauteur dune thèse intitulée : " Hauts fonctionnaires et immigration en France (1962-1982). Socio-histoire dune domination à distance " (2006).
Les discutants :