Atelier 4

Les organisations politiques en congrès. Acteurs, enjeux et symboles.

Nathalie ETHUIN ( ATER en science politique. CRAPS. Lille 2 )
Julien FRETEL ( PRAG à l’IEP de Lille. CRPS)

 

L’atelier que nous proposons d’animer a pour objet les congrès des organisations politiques pour en étudier le déroulement, les acteurs, les enjeux et les usages tout autant stratégiques que symboliques dont ils font l’objet. Nous faisons l’hypothèse liminaire que les congrès constituent un lieu d’observation heuristique pour étudier les organisations politiques, qu’il s’agisse des partis, des syndicats ou autres groupes d’intérêt.

Paradoxalement, alors que ces congrès retiennent souvent l’attention des médias, ils ne sont que rarement l’objet en tant que tel de travaux de science politique.

Les congrès constituent des matériaux de la recherche mais rarement un objet de recherche.

S’ils sont utilisés pour étudier la sociologie des cadres d’une organisation à partir d’une prosopographie des congressistes, ou pour appréhender les évolutions doctrinales et stratégiques à partir des motions de congrès, on sait rarement ce qui s’y passe concrètement sauf à s’en remettre à la logique du scoop.

Il existe bien-sûr des travaux prenant pour objet les congrès, par exemple les études consacrées au congrès de Tours, ou les congrès du Parti socialiste. Mais l’objet " congrès " n’en demeure pas moins délaissé au sein de la littérature pléthorique sur les partis et les groupes d’intérêt.

L’importance que les organisations accordent à leur congrès est également un argument qui plaide en la faveur d’une interrogation spécifique et scientifique sur cet objet.

Par exemple, l’histoire officielle et la mémoire collective des organisations sont très souvent arrimées à la chronologie des congrès.

Cette centralité des congrès s’explique en premier lieu parce qu’ils représentent statutairement l’instance de légitimation démocratique d’une organisation. Un congrès nécessite une préparation, censée impliquer tous les échelons de l’organisation et représente donc le lieu de souveraineté des adhérents. En quelques jours de congrès, il s’agit de mettre en acte et en scène les règles qui régissent l’institution. Le congrès est aussi le lieu par excellence où les positions et les conflits se cristallisent et sont publicisés, où des analyses politiques et des stratégies sont légitimées par les nombreuses élections et les acclamations diverses et où les modalités de la représentation et de la délégation sont renégociées par l’élection des dirigeants.

Par ailleurs, l’importance des congrès est amplifiée par leur couverture médiatique ; les médias participent à la construction de l’événement et à la fixation du sens en privilégiant des angles de traitement et en hiérarchisant les moments et les événements qui scandent son déroulement .

Ce rapide rappel de quelques fonctions et enjeux des congrès en souligne encore une fois l’importance mais ne saurait épuiser les pistes de recherche qu’ils peuvent inspirer. Il nous semble que les congrès ne peuvent être réduits à leurs fonctions explicites, sauf à fétichiser les règles qui les régissent. Pour comprendre ce qui se joue dans les congrès, ce que les groupes y investissent, la complexité et la pluralité de leurs enjeux et de leurs usages, il nous paraît nécessaire de mener des enquêtes de terrain diversifiées, tant en ce qui concerne les groupes étudiés que les approches adoptées, et ainsi alimenter une réflexion collective sur l’objet congrès.

Hypothèses et axes de recherche :

Ces réflexions liminaires permettent d’avancer quelques hypothèses.

A travers la saisie des enjeux et des types d’acteurs qui font des congrès des institutions singulières, avec leurs rituels, leurs coups remarqués, leurs tensions plus ou moins médiatisées, leurs scènes et leurs coulisses, nous chercherons à nous interroger sur ce que sont ces moments tout à la fois attendus et imprévisibles. Quels effets ce cadre de production particulier peut-il produire sur les groupes et sur leurs publics ?

Les congrès peuvent d’abord être analysés comme des instances de légitimation et d’officialisation des dirigeants, des analyses et des stratégies. Nous tenterons d’éclairer ces notions en les confrontant à des réalités précises : les habitudes institutionnelles et leurs cultures, les tactiques, les entreprises de maintien ou de subversion des rapports de force, les opérations de justification et les entreprises d’entretien de la confiance entre leaders et militants.

Les congrès sont aussi des moments où le collectif se donne à voir, où le groupe tente de véhiculer une image valorisée de l’organisation. Un congrès est une pièce essentielle dans le dispositif de communication interne et externe, d’où toute l’attention portée à la phase préparatoire, à l’organisation matérielle et au déroulement du congrès ( dispositifs matériels, publics, ordre du jour, organisation des débats et prises de parole, dimension symbolique). S’il reste bien entendu des zones d’incertitude dans le déroulement, il s’agit de les minimiser au maximum. Les congrès peuvent dès lors être analysés comme rite d’institution qui participent de l’objectivation et de la stylisation des groupes. Là encore nous plaidons pour une démarche résolument empirique.

Egalement, en mettant en perspective les données rapportées par les chercheurs, nous essaierons de fournir des pistes sur ce que l’on appelle " le changement " dans l’organisation, en partant de l’idée que les congrès, en règle générale, sont des moments décisifs ou voulus comme tels par les responsables et ce seul fait est producteur d’effets.

Proposition de déroulement de l’atelier

L’objectif de cet atelier est d’amorcer une réflexion collective sur les congrès, en prenant appui sur des études de cas diverses.

Après avoir rappelé un certain nombre d’hypothèses et d’axes de recherche, il nous paraît judicieux de laisser place à une discussion collective, qui pourrait se clore par un bilan provisoire et une mise en réseau des chercheurs désireux de perpétuer ces réflexions.

A ce jour plusieurs personnes ont déjà fait savoir leur intérêt pour cet atelier  et s’engagent à proposer par écrit leur contribution afin d’alimenter la réflexion à partir de terrains divers :

Hélène Combes ( ATER à Valenciennes) : les congrès du PRD mexicain

Nathalie Ethuin (ATER Lille2) : les congrès du PCF

Florence Faucher : les conférences des partis britanniques

Julien Fretel ( PRAG IEP Lille) : les congrès de l’UDF

Emmanuel Le Doeuf : les congrès de la CGT

Patrick le Lidec ( ATER à Lille 2) : les congrès de l’AMF

Hélène Michel ( MDC à Strasbourg) : Congrès de l’ Union Nationale des Propriétaires Immobiliers

Benoît Verrier ( ATER à Strasbourg) : le Congrès d’Epinay du PS

Nous ne sommes pas encore en capacité de communiquer les intitulés précis des communications qui seront proposées par écrit. Les premiers contacts laissent présager d’une complémentarité intéressante des hypothèses, des approches et des méthodes d’enquête pour nourrir une réflexion sur les congrès.

Etant donné le nombre de propositions d’interventions, l’atelier prendra la forme d’une discussion collective à partir de quelques thèmes transversaux, après une courte introduction présentant les différentes recherches en cours et les principales pistes qui s’en dégagent.

Pour tout contact :

Nathalie ETHUIN : nethuin@yahoo.fr

Julien FRETEL : jfretel@wanadoo.fr