Atelier 2
Regards croisés sur la politisation des individus : ici et ailleurs, hier et aujourdhui
Responsables
scientifiques :
Mounia Bennani-Chraïbi (IEPI,
Université de Lausanne) Mounia.Bennani-Chraibi@unil.ch
Jean-Gabriel Contamin
(CERAPS,
Université de Lille II) jgcontamin@noos.fr
Le terme politisation est un de ces mots aujourdhui à la mode en science politique que lon trouve sollicité de manière récurrente dans des problématiques, dans des contextes et à propos de réalités très différentes.
Linconvénient dune telle profusion est bien sûr que ce concept-éponge en vient à perdre en intensité et en contenu au fur et à mesure quil gagne en extension, à rendre difficile toute discussion scientifique autour de la réalité des processus de politisation, des facteurs qui en rendent compte, de leurs effets ou des méthodes adaptées pour les étudier. Et, ce, alors même que ce concept ou, tout au moins, lun de ses antonymes, fait lobjet de manière récurrente dun investissement public et médiatique relativement fort autour de la sempiternelle question de la crise de la politique, dont lune des dimensions serait celle de la dépolitisation ou non des débats, des individus ou des médias.
Cet atelier vise précisément à requestionner lune des dimensions de ce terme, la politisation des individus, tout en sattachant à poursuivre une entreprise nécessaire de décloisonnement entre les aires et les disciplines.
En premier lieu, nous tenterons détablir un inventaire de la manière dont le concept de politisation des individus, tant pour observer des sociétés historiques, que pour décrire des expériences contemporaines dans des espaces géographiques et sous des régimes politiques variés. Non pas, bien sûr, en vue de donner " la " définition dans une vaine tentative de taxinomie définitive, mais afin de proposer des outils pour faciliter la rencontre autour de codes en apparence communs.
En effet, selon les disciplines, les problématiques, les périodes et les espaces appréhendés par les chercheurs, le terme de " politisation " revient avec des usages très diversifiés qui ne sont pas systématiquement spécifiés et qui, en filigrane, recoupent des modalités de repérage du politique distinctes. Si les approches historiennes et socio-historiennes mettent surtout laccent sur le processus dacculturation, les recherches en sociologie politique se focalisent sur des dimensions telles que la participation, la socialisation, la compétence politique technique et sociale, la conflictualisation, le plus souvent en rapport avec la scène électorale. Quant aux travaux qui portent sur des aires géoculturelles " exotiques ", ils sinterrogent sur la possibilité même dadopter des acceptions aussi restrictives du politique et de la politisation.
Ici et là, les débats sont riches. Dun côté, les processus dacculturation sont vigoureusement réinterrogés : critique des démarches téléologiques ; ou, inversement, des approches compréhensives peu sensibles à la réception de lévènement national, etc. De lautre, le caractère concurrentiel, interactif et continuel des socialisations a été souligné, les postulats des théoriciens de la culture civique sur la participation ont été remis en cause, les approches élitistes centrées sur les logiques de spécialisation politique discutées, les dynamiques de conflictualisation réhabilitées. Ceux qui observent dautres aires, finalement, en viennent à explorer des " avenues de la participation " (Singerman, 1995), qui font appel à dautres types de compétences, par-delà les confins de la scène politique instituée.
Pourtant, si lon excepte quelques démarches volontaristes, le dialogue entre ces traditions demeure limité et cloisonné. Les coordinateurs de cet atelier font à leur tour le pari des vertus scientifiques de lhybridation réciproque en proposant une démarche comparative fondée sur un double mouvement de va et vient. Il sagit de croiser les regards non seulement à partir dexpériences différenciées sur le plan géoculturel, mais aussi sur le plan historique. Et ce, pour sinterroger, dune part, sur les transfigurations que connaît ce concept au gré de ses pérégrinations et, dautre part, sur les apports aux débats contemporains de ces opérations d'importation et dexportation.
Lintroduction de latelier sera assurée conjointement par les deux organisateurs (15 mn). Des intervenants travaillant sur des univers différents seront appelés à préciser comment ils usent du concept de politisation des individus dans leurs travaux respectifs tant dun point de vue théorique que méthodologique (15 mn chacun). Le débat sera ensuite ouvert au public (une heure).
Crossed
analysis on the politicization of individuals:
Here and elsewhere, yesterday and today
The term of politicization is so diffused in social sciences that it loses its intensity and content. Nevertheless, this concept is recurrently the object of public and media focus through the question of the "crisis of politics" or "depoliticization".
This workshop aims to question again one of the dimensions of this term, the "politicization of individuals", and at the same time to pursue the necessary enterprise of breaking the barriers erected between areas and disciplines.
First, we will show how the concept of "politicization of individuals" is used, in the observation of historical societies, as well as in the description of contemporary experiences in different geographical areas and under various political regimes. Thus, we wish to propose some tools to make the meeting between those apparently common codes easier.
Secondly, we want to establish a dialogue between three traditions which use this concept around specific issues, periods, and areas which are usually too compartmentalized. Historical and socio-historical approaches stressing the process of acculturation. Studies on political sociology focussed on dimensions such as participation, socialization, political sophistication, conflictualisation, often related to the electoral scene. Finally, some researches on "area studies" which wonder also about the possibility of adopting such restrictive definitions of politics and of politicization.
Thus, we will question, on one hand, the transfigurations of the concept through its wanderings, and on the other hand, the contribution to the scientific debate of these import and export operations.
The two organizers will introduce the workshop conjointly. Speakers working on different fields will specify how they use the concept of politicization of individuals in their respective works, both from theoretical and methodological points of view. Afterwards, the debate will be open to the public.