Atelier 24

Partis politiques et changement : tentatives de rapprochements théoriques autour d’une notion incertaine

Responsables scientifiques :
Thierry Barboni (ATER et doctorant en Science politique, CRPS, Paris I)
Thierry.Barboni@malix.univ-paris1.fr

Djamel Mermat (ATER et docteur en Science politique, CERAPS, Lille II) djamel.mermat-2@univ-lille2.fr

 

Le but de cet atelier est d'identifier une méthode capable de transcender des cadres théoriques apparemment irréductibles les uns aux autres, avec pour principal objectif de résoudre l’équation du changement pour les organisations partisanes.

Hier encore promis au déclin, les partis politiques, qu’ils soient envisagés comme " partis de cadre moderne ", " électoral-professionnel " ou bien encore " cartel ", ont fait preuve d’une indéniable adaptabilité face à un monde contemporain en profonde mutation. Cependant, l’interrogation demeure : comment examiner rigoureusement et concrètement les différents déterminants du changement organisationnel ? N’atteint-on pas, à travers cette question du changement partisan, une des limites des modélisations idéal-typiques ? Un éclairage nouveau, tenant compte des évolutions en cours, de la notion même de changement devient une nécessité, si l’on souhaite saisir la complexité de l’ingénierie organisationnelle. Car derrière le terme de " changement " se cachent deux acceptions complémentaires certes, bien que différentes dans leur essence :

- Le changement se réfère d’abord à une série de variables qui pèsent sur l’organisation. Ces variables renvoient à la source du changement, interne ou externe, ou à sa forme incrémentale ou discontinue, voire à sa trajectoire contrôlée ou contingente.

- Mais le changement peut aussi être considéré comme un processus, en vertu duquel un parti passe d’une forme d’organisation à une autre, ou tout au moins tente d’adapter - ou non - son organisation pour tenir compte des évolutions, nombreuses, qu’il doit affronter.

L’interpénétration de ces deux perspectives rend d’emblée floue la notion de changement et complexifie l’analyse des partis politiques. Par conséquent, notre démarche se propose de procéder à un renversement méthodologique : le changement partisan doit être considéré ici non plus comme un moment d’ajustement mais bien comme un résultat à partir duquel il deviendra possible d’évaluer la pertinence empirique d’un modèle théorique.

Au découpage organisationnel classique du changement en deux phases, entre ce qui change dans le parti et ce qui le fait changer, il nous donc semble préférable d’opter pour une démarche en trois temps : causes du changement, processus d’intégration/ou non de ce changement, et enfin conformation éventuelle à un modèle organisationnel pas encore complètement révélé.

La problématique du changement organisationnel, ainsi saisie, pose alors trois questions principales : que changer ? Comment ? Pourquoi ? La première interrogation insiste sur la détermination des différentes composantes du système organisationnel qu’il est possible de transformer. La seconde question concerne la mise en œuvre même du changement. Se demander " pourquoi ? " c’est s’intéresser au diagnostic stratégique qui se décline en termes d’opportunités ou de risques. Rechercher des outils théoriques pour dissocier clairement origines et conséquences du changement, au-delà de l’impression habituelle d’enchevêtrement des mécanismes organisationnels et des acteurs du parti, constitue donc un axe prioritaire de cet " atelier ".

L’ " atelier " se donne donc comme but de saisir ce que " faire partie et faire le parti " signifie. Cela suppose d’abord d’interroger les outils pertinents pour déceler et expliquer le changement. Cela implique également d’accorder toute leur place à l’histoire et à la culture des organisations partisanes. Ces questionnements permettront enfin d’identifier les contraintes qui pèsent sur les acteurs partisans et les marges de manœuvre dont ils disposent.

Dépasser le cadre de l’analyse organisationnelle pour mieux en apprécier les évolutions, renvoie à la dernière préoccupation de cet " atelier " : savoir si l’organisation partisane peut être analysée séparément et pour elle-même, ou s’il ne conviendrait pas mieux, dans une démarche compréhensive, de réinsérer l’organisation dans l’ensemble des relations sociales qu’elle exprime et représente. Autrement dit, faut-il postuler que les organisations partisanes sont en elles-mêmes le moteur du changement ou que les formes de l’organisation représentent en fin de compte une objectivation des contraintes multiples affrontées par les membres du parti ? Répondre à la question, c’est ainsi savoir quelle posture adopter par rapport aux modèles partisans élaborés et en même temps réinscrire l’analyse empirique dans une volonté de confrontation à ces modèles. Pour saisir ce cheminement vers le changement, il convient alors rechercher dans d’autres disciplines des apports théoriques susceptibles d’éclairer sous un angle différent le processus d’adaptation des organisations partisanes.

 

Political parties and change: an attempt at theoretically bringing together into a dubious concept

Even if until recently political parties have been said to be declining, they have undoubtedly proved to be capable to adapt to our contemporary changing world. However, the same question remains as before : how to study the various factors of organisational change rigorously and concretely? Taking into account the present evolutions in progress a new light has to be set over the very concept of change, if one wishes to seize the complexity of organisational machinery. Thus, we propose to carry out a methodological inversion: Political organization’s changing must not be seen here as a way to adapt but rather as an output that will help to assess the empirical relevance of any theoretical model.

Better than the traditional divide of organisational change into two steps - what changes within political parties and what makes them change, we prefer to choose a three-fold process: what are the causes for change; second, change’s implementation; and finally, does it eventually conform with an organisational model that has not yet been fully revealed ?

So if change is to be understood in that meaning, the issue about organisational change, raises three main questions: what to change? How? Why? The first question insists on how to determine the various components of the organisational system that may be transformed. The second question relates to change implementation. Finally, asking the question ‘why’ suggests that we are interested in the strategic diagnosis that can be described as either opportunities or risks. These questions will finally make it possible to identify the constraints which weigh on political actors and to delineate their room for manoeuvre.

The main priority for this workshop is to look at theoretical tools to clearly differentiate origins and consequences of change, so that we can go beyond the usual vision of entangled organisational mechanisms and party actors, This implies that history and culture of political organisations are fully studied.

In order to go beyond organisational analysis and to assess evolutions in-depth, this workshop will also look at another issue : can a political organisation be analysed on its own and for its own sake or would it be more usefully integrated within the whole bulk of social relationships it expresses and represents ?

In other words, is it necessary to postulate that partisan organizations are the driving power for change or that at the end of the day, organizational forms represent an "objectivation" of the multiple constraints that party-members are facing? Answering that question will help us to decide how to react when reading about political party models that are proposed and at the same time how to confront empirical analyses with these models…