Atelier 5
Les anciens combattants dans les transitions de la guerre à la paix
Responsables
scientifiques :
Nathalie
Duclos (Université de Tours) nduclos@club-internet.fr
David Garibay (Université Lyon 2) david.garibay@univ-lyon2.fr
Cet atelier se propose, dans une perspective comparative mais aussi pluridisciplinaire, de sintéresser aux périodes qui suivent un conflit armé et la conclusion dun cessez le feu, périodes de normalisation où se pose le problème du devenir des anciens combattants, quil sagisse de conscrits appelés sous les drapeaux, de mobilisés volontaires ou de combattants enrôlés de force dans un mouvement de lutte armée.
Dans le cas des sorties de conflits intra-étatiques, souvre une période dite de " transition sécuritaire ", au cours de laquelle les institutions (re)crées à loccasion du règlement de la paix ou les médiateurs internationaux sont censés assurer le passage (ou non) dune situation de violences diffuses à une phase où lEtat parvient à nouveau à revendiquer avec succès son monopole de la coercition. Le devenir des anciens combattants pose une série de problèmes, relatifs à lenjeu de leur retour dans la vie civile et de ses incidences sur la vie sociale et politique. Dans quelle mesure et à quelles conditions se produit effectivement une démobilisation des anciens combattants ? Outre la remise des armes, lenjeu est en effet aussi celui dune " démobilisation culturelle " (John Horne) et de la " civilianisation " (Mats Berdal) des anciens combattants.
La situation des anciens combattants après guerre est susceptible de faciliter ou, au contraire, de contrarier la transition en cours de la guerre à la paix. Il sagira de sinterroger sur leur influence sur le cours du processus de pacification. Les cas de remobilisation armée apparaissent comme les situations les plus évidentes déchec de ce processus et dobstacles à la paix. Pourtant, la réflexion portera davantage sur les cas, plus fréquents, de réussite apparente des programmes dits de DDR (Désarmement, Démobilisation et Réintégration). En effet, sils permettent à lEtat dassurer à nouveau la sécurité sur son territoire, ils ne garantissent en rien que les expériences de retour à la vie civile danciens combattants ne soient à lorigine dune " brutalisation des sociétés ", selon lexpression de lhistorien G. L. Mosse.
La question ultime, sagissant du devenir des anciens combattants dans ces situations de transition de la guerre à la paix, est bien celle de la sortie de la violence et de ses éventuels obstacles. Que produit, après guerre, lexpérience de la guerre, i.e de lusage de la violence, de la pratique du combat, de lexpérience de côtoyer la mort et de la donner, sur les anciens combattants ? Quels sont les effets du " reversement " des anciens combattants dans la vie sociale et politique qui se met en place à loccasion de la signature de la paix ? Leur démobilisation, à partir dune réintégration dans de nouvelles institutions (armée, police, etc.), est-elle partie prenante dun processus politique de refondation du contrat social ? Quelles sont, lorsquelles existent, les modalités de participation politique des anciens combattants démobilisés : sont-ils (ou non) à la source de phénomènes de radicalisation, notamment à partir dune présence au sein de nouvelles organisations politiques issues des acteurs armés ? Ces anciens combattants recourent-ils aux logiques de légitimation de laffrontement violent dans la nouvelle scène politique pacifiée qui est censée les proscrire ? Des politiques daccompagnement de la " normalisation " des vétérans sont-elles concevables, en particulier en provenance des organisations internationales, au-delà de la simple démobilisation ? Quelles en sont leurs composantes (psychologiques, sociologiques, militaires) ?
Ces questions ressortissent de différents niveaux danalyse : macro (Etat, politiques publiques nationales et internationales), meso (organisations sociales et politiques) et micro (individu)
Le parti pris de cet atelier est de décloisonner les analyses dauteurs travaillant sur des sorties de conflits intraétatiques avec ceux sintéressant plutôt aux conflits interétatiques. La distinction intra/inter ne nous parait pas opérante dans la mesure où ce qui importe, cest la sortie de la violence, quel que soit lespace où elle prend place (ou non). Il sagira aussi de confronter les points de vue dhistoriens travaillant sur des conflits anciens aux analyses portant sur des conflits récents, dans lobjectif de relativiser également la pertinence des analyses en termes de " guerres nouvelles ". De récents travaux dhistoriens revisitant la Grande Guerre pour y mettre à jour sa violence ont bien montré que la " barbarie " nétait pas lapanage des seules guerres nouvelles. Enfin, il sagira aussi de transcender une dichotomie disciplinaire qui nous parait artificielle, entre relations internationales et sociologie politique, et de tenter de confronter les approches des politistes à celles des historiens.
Former combatants in transitions from war to peace
This workshop is focused on the question of reintegration of former combatants (i.e. demobilized soldiers, militias and guerillas, or forced recruits) in the period of normalization that follows the end of an armed conflict and the signature of a cease-fire. Its approach is both comparative and multi-disciplinary.
The end of an internal armed conflicts leads to a period of "security transition", where the creation (or re-creation) of state institutions shaped by peace agreement or international mediators establish the passage from a situation of disseminated and generalized violence to a situation where the government is supposed to enforce law and order ("the monopole of coercion"). In this situation, the reintegration of former combatants leads to a new series of problems that affect either their personal reintegration or the political and social life of the country. What are the prospects of and conditions to an effective reintegration of former combatants? Beyond their military demobilization, the outcomes are also on the "cultural demobilization" (John Horne) or the "civilianization" (Mats Berdal) of former combatants.
The immediate future of former combatants is a central factor in facilitating or hindering the transition from war to peace. The central question of the workshop deals with their influence on the general process of peace making. The cases of immediate armed remobilization are the clearest cases of failure of this process. The workshop is more concerned, however, by more frequent cases of apparent successes of so-called DDR (Disarmament, Demobilization and Reintegration) programs. In these cases, a new government may ensure security on its own territory, but still suffer from what is termed a "brutalization of societies" (G. L. Mosse) due to the difficulty of reintegrating former combatants in civil life.
Indeed, the central question of reintegration of former combatants revolves around a way to exit a violence-based way of life and what obstacles they face in achieving that aim. How do these men and women deal with their experience of war, of the daily violence they confronted to, once the war finished? What are the effects of their participation in the social and political life that emerge during peace time? Is their participation to new institutions (army, police) a significant element of the rebuilding of a new social contract? How do former armed organizations become legal political parties, and is this a factor of reintegration for former combatants in a new political arena? In the new political organizations, where violence is supposed to be banned, do former combatants revert to the logic of violence and confrontation that were prevalent in war situations? And how do specific policies of reintegration, particularly by international bodies, help to achieve the aim of normalization, beyond the simple process of military demobilization? What would be the building blocks of such policies (psychological, sociological, military)?
These questions will be approached by three levels of analysis: macro (state-level, national and international public policies), meso (political and social organizations) and micro (at the individual level).
The aim of the workshop is also to break three traditional divisions: