Module du GEOPP (Groupe d'études sur les partis et les organisations partisanes)

L'argent et les partis politiques
Money and Political Parties

Responsables scientifiques :
Hélène Combes (CNRS-CRPS Paris I), combeshvc@yahoo.com
Julien Fretel (Sciences Po Lille-CERAPS),
freteljulien@yahoo.fr

 

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" Parce que les rapports entre l’argent et la politique exercent une inhibition sur la classe politique, celle-ci a été la plupart du temps réticente à en définir le contenu (1). " C’est ainsi que Yves-Marie Doublet, dans l’introduction de son Que sais-je ? sur le financement de la vie politique, exprimait indirectement la difficulté à prendre le rapport entre l’argent et la compétition politique pour objet de recherche. Et un bref tour d’horizon des travaux existant sur le thème de la finance en politique ne fait que confirmer que ce domaine d’études est largement en friche. Cet angle mort, tout logiquement, concerne également le rapport entre l’argent et les partis politiques.
En ce qui concerne la question de l’argent et des partis politiques, deux explications, notamment, peuvent être apportées afin d’expliquer le peu d’intérêt de la science politique pour ce thème. D’abord, il est indéniable que la manière dont les acteurs politiques abordent ou, le plus souvent, refusent d’aborder cette question rend difficile au chercheur tout accès permettant de considérer le poids et les multiples usages de l’argent en politique. Professionnels de la politique mais aussi militants opposent trop systématiquement l’intérêt financier à l’idéal qu’ils ont de la politique pour permettre aux politistes d’approcher empiriquement cette réalité ; comme si le fait d’utiliser l’argent comme monnaie, comme étalon de mesure ou comme réserve de valeur délégitimait de facto la dimension désintéressée des comportements politiques ou partisans. Aussi, pour avoir une vague appréhension des processus de monétarisation qui entourent les partis politiques doit-on se contenter des publications officielles comme, dans le cas français, celle de la Commission nationale des comptes de campagne et des financements politiques (CNCFP). Ces comptes, aussi intéressants soient-ils, ne serait-ce que pour établir des comparaisons d’une année sur l’autre, d’un parti à l’autre, présentent pourtant de nombreuses restrictions et des zones d’ombre que les différentes législations sur le financement de la vie politique n’ont pas encore comblées. Bref, savoir assez précisément ce que l’argent fait aux partis politiques dans leurs formes comme dans les buts qu’ils poursuivent reste aujourd’hui encore un domaine qui reste à explorer.
L’autre facteur pouvant expliquer pourquoi il est peu fréquent de voir la science politique aborder la dimension monétaire de la vie politique en général et de l’activité partisane en particulier tient à un problème d’ordre épistémologique. Quel statut accorder en effet à la monnaie parmi les choses vivantes et les choses inertes que la sociologie se doit de saisir dans le monde social, quelles " significations sociales " doit-on prêter à l’argent, a priori (2), si l’on veut réussir à l’intégrer dans la construction de nos objets d’études en l’occurrence ? Est-ce que, comme le suggère G. Simmel (3), l’argent est " le moyen le plus pur " par lequel s’organisent de nombreuses activités dans le parti ? En d’autres termes, n’est-il qu’un reflet et un intermédiaire " neutre " régissant les rapports partisans ? Faut-il au contraire récuser cette approche instrumentale et s’interroger plus exclusivement sur la force quasiment intrinsèque de l’argent en tant que " fétiche " ayant la capacité de transformer substantiellement les rapports sociaux, et plus particulièrement les interactions au sein des organisations politiques ? Ici, on reconnaît l’argument marxiste qui énonce le fait que la monétarisation du monde social est un phénomène de grande ampleur qui agit comme un " niveleur radical (4) ". Entre ces deux manières antagoniques de penser le rôle social de la monnaie, il existe une synthèse plus féconde pour la réflexion politologique. Il y a quelques années, Viviana Zelizer nous invitait notamment à (re)considérer l’argent de façon multidimensionnelle, de sorte qu’on ne se hasarde pas à dissocier sa matérialité des usages spécifiques qui en sont faits, ni des positions socialement situées de ses détenteurs. C’est donc à cette invite à la fois empirique et théorique que nous voudrions répondre à l’occasion de notre atelier, qui se déroulera lors du congrès de l’Association française de science politique, à Toulouse, en explorant les usages partisans de l’argent dans nos sociétés contemporaines.


" Because ties between money and politics hold on inhibition above political word, the lather has often been reluctant to define its content ". This is the way Yves-Marie Doublet (5) chose to express indirectly the difficulty to consider the link between money and political competition as a field of study. Moreover a brief overview of works dealing with the issue of money and politics proves that this area is ignored, basically in France. Therefore this stalemate implies also the relationship between money and political parties.
Regarding the issue of money and political parties, there are two explorations to understand the obvious lack of interest from political science towards this discussion. First of all, undoubtedly the way politicians tackle or refuse tackle this question is a hurdle for any researcher to consider the weight and many uses of money in politics. Politicians as well as supporters regulary contrebalance the financial interest to their ideal of politics. They prevent political scientists to handle this reality as if using money implied necessarily a loss of legitimacy in political behaviours, supposed to be disinterested.
As a mater of fact, to get a vague idea of how financial process surround political parties we have to do with official publications such as in France the one from the "Commission nationale des comptes de campagne et de financement des parties" (CNCCFP). These accounts, as interesting as they are, help us to establish comparisons between several dark sides.
The other way to explain why it is so score to see political science handling the money field in politics broadly speaking and the political parties activity in particularly comes from an epistemological problem. What status allowing to money among animate and unanimate things that sociology considers, what "social meaning" to give to money ? This is why we would like to answer both empirically and theoretically in this workshop exploring the political use of money in our society.

 

(1) Doublet (Yves-Marie), Le financement de la vie politique, Paris, PUF, 1997 (coll. QSJ).
(2) Cf. Zelizer (Viviana), La signification sociale de l’argent, Paris, Seuil, 2005.
(3) Simmel (Georg), Philosophie de l’argent, Paris, PUF, 1987.
(4) Marx (Karl), Fondements de la critique de l’économie politique, Paris, Anthropos, 1967.
(5) Doublet (Yves-Marie), Le financement de la vie politique, Paris, PUF, 1997 (coll. QSJ).


Programme

1ère Partie : Argent et ordre partisan

 

2ème Partie : Partis et tractations monétaires

 


Contacts Intervenants

ALPARSLAN Mine, minealparslan54@hotmail.com

COMBES Hélène, combeshvc@yahoo.com

FOUCAULT Martial, martial.foucault@umontreal.ca

FRANçOIS Abel, Abel.francois@enst.fr

FRETEL Julien, freteljulien@yahoo.fr

KAKELENGWA Billy, mbkakelengwa@yahoo.fr

LEMOINE Benjamin, benlemoine@hotmail.com

MARIJNEN Anne, a_marijnen@yahoo.it

OLIVIER Laurent, laurent.olivier@univ-nancy2.fr

PHELIPPEAU Eric, e-phelippeau@wanadoo.fr

RAGOUET Pascal, pragouet@wanadoo.fr