Module du groupe "politiques publiques"

Une nouvelle étape pour la sociologie de l’Etat ?
New perspectives for the sociology of the state

Responsables scientifiques :
Desmond King (Université D’Oxford, Official Fellow, Nuffield College Oxford Desmond King), desmond.king@nuffield.ox.ac.uk
Patrick Le Galès (CNRS, CEVIPOF / Sciences Po Paris), patrick.legales@sciences-po.fr

 

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L’analyse des politiques publiques est devenue un des piliers de la science politique, en France comme à l’étranger. Contrairement à la tradition de la policy science et sous l’influence de J.Leca, B.Jobert ou P.Muller, l’analyse française des politiques publiques a gardé comme ambition de contribuer à l’analyse de la formation de l’ordre politique et à la recomposition de l’Etat.

Pour l’analyse des politiques publiques, l’Etat n’est pas envisagé comme " l’être ", comme une force sacrée comme le suggère J.Leca (2003) mais en termes d’action, de faire. L’analyse des politiques publiques permet de comprendre " l’Etat en action " (Jobert et Muller), et en interaction avec différents groupes (Hassenteufel). L’Etat moderne occidental, forme politique originale qui résulte de processus sociaux historiquement situés, est devenu le mode d’organisation politique légitime des sociétés européennes, puis s’est répandu de différentes manières sur l’ensemble du globe. Depuis la fin du XIXème siècle, l'Etat, sous des formes variées, se caractérise par les éléments suivants : la maîtrise d’un territoire limité par des frontières, une bureaucratie centralisée et différenciée des autres forces sociales, une laïcité minimale séparant l’espace politique de l’espace religieux, un droit, des normes et règles, une conception forte de la citoyenneté rattachant directement les citoyens à l’Etat et limitant l’emprise des groupes et des communautés intermédiaires, un système d'imposition, une monnaie, des forces assurant le monopole de la violence pour protéger les citoyens : police et armée. Toute une littérature s’emploie à caractériser le rôle d’un Etat dilaté entre processus de décentralisation d’une part, processus d’européanisation et de globalisation d’autre part. Ces deux dynamiques perturbent le jeu de l'Etat. S’il est lui-même acteur et moteur de ces processus, il est aujourd'hui moins déterminant dans la structuration et la direction de la société. Ces processus provoquent un bouleversement des communautés politiques traditionnelles, des recompositions des échelles et des acteurs qui échappent au contrôle de l'Etat-nation Ainsi, les logiques des interactions à des échelles transnationales constituent des points de rupture pour la conception classique de l'Etat.

A la suite de S.Cassese et V.Wright dans leur ouvrage sur la " recomposition de l’Etat en Europe " (La Découverte, 1997), G.Poggi avait proposé de travailler sur l’analyse d’un " nouveau cycle de l’Etat " afin de sortir du débat maintien/retrait de l’Etat et de prendre en compte les transformations engendrées par des processus divers infra et transnationaux. Les analyses combinant politiques publiques et contribution à la recomposition de l’Etat se sont multipliées ces dernières années, (sur l’Etat Providence, sur les questions de sécurité, sur l’internationalisation de l’Etat, sa dilatation, sur les techniques et les instruments qui recomposent l’Etat) il est sans doute temps de reprendre ces matériaux afin de réfléchir à une sociologie politique renouvelée de l’Etat autour des questions formulées en termes de territorialisation, d’internationalisation de l’Etat, de transformation des modes de pilotage et de direction (Etat activiste, Etat régulateur).

En dehors de la France, des grands programmes de recherches ont d’ailleurs été engagés aux Etats-Unis et en Europe dans cette direction : on peut citer le programme " Transformations of the state" de l’université de Bremen dirigé par S.Leipfried et Michael Zürn, le troisième volume en cours de rédaction de Michael Mann (The sources of Social Power) sur l’Etat au XXème siècle ou bien le livre collectif paru chez Harvard University Press dirigé par Jonah Levy " The state after statism ". Les historiens ont également multiplié des travaux importants qui éclairent les tranformations contemporaines de l’Etat d’un nouveau jour, par exemple au sein du groupe de recherche que coordonne Marc-Olivier Baruch à l’EHESS.

Cet atelier a pour objet de faire un premier état des lieux des pistes et des résultats des programmes de recherche sur la transformation de l’Etat en France, en Europe, aux Etats-Unis afin d’engager une réflexion sur les transformations contemporaines de l’Etat, et peut être les lignes d’un future grand chantier de recherche collectif. Ce module vise à confronter des travaux contemporains qui contribuent à ce chantier de recherche (par exemple sur les sciences du gouvernement ou sur les politiques publiques) aux travaux plus directement orientés vers la sociologie de l’Etat.


The modern Western state, an original political form resulting from historically located social processes, has become the legitimate mode of political organization for European societies. It has taken various forms since the end of the 19th century, but these have always been characterized by: control of a bounded territory, enclosed within borders; a centralized bureaucracy, differentiated from other social forces; a minimal degree of secularity separating the political space from the religious space; a body of law protecting the state’s borders; a strong concept of citizenship, which attaches citizens directly to the state and limits the ascendancy of intermediate groups and communities; a taxation system; a currency; forces ensuring a monopoly of violence in order to protect its citizens — the police and armed forces. Concretely, states established their authority through taxation, through enforcing borders (both by guaranteeing the safety of their citizens and by making war), through the development of legal rules, and through a currency. The sovereignty of the state, imperfect and relative as it may have been, acquired full meaning within a system where states were viewed as independent of one another, where there was no legal power superior to the state. But this Westphalian concept of the state is now being called into question .

The panel investigates various dimensions of the restructuring of the state in order to identify the new cycle of the state that suggested Gianfranco Poggi. It will be based on current recent research project comparing state restructuring in different western context.


Programme

Discutant : BIRNBAUM Pierre (Université de Paris I et University of Columbia)


Contacts Intervenants

BARUCH Marc-Olivier, Marc-Olivier.Baruch@ehess.fr

BIRNBAUM Pierre, birnbaum@univ-paris1.fr

KING Desmond, desmond.king@nuffield.ox.ac.uk

LE GALES Patrick, patrick.legales@sciences-po.fr

LEIPFRIED Stephen, stlf@zes.uni-bremen.de

LEVY Jonah, jlevy@berkeley.edu