Module inaugural du groupe SPCA (Science politique comparée des administrations)

Etudier l’Union européenne en France : objets, paradigmes, méthodes
Analyzing the European Union in France : Objectives, Paradigms, Methods

Responsables scientifiques :
Alistair COLE (Université de Cardiff / Cevipof-IEP de Paris)
Jean-Michel EYMERI-DOUZANS (IEP de Toulouse, Laboratoire des sciences sociales du politique - LaSSP)

 

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Créé récemment par l’AFSP, le nouveau Groupe de travail " Science politique comparée des administrations " tient sa réunion inaugurale dans le cadre de ce module.

Pourquoi un Groupe " Science politique comparée des administrations " ?

Maintes raisons justifient la mise en place de ce Groupe. La principale est qu’au rebours d’une longue période où " la science politique française (fut) oublieuse de l’administration publique " (Françoise Dreyfus), les années récentes sont marquées par une floraison de recherches. La science politique française des années 1960-70 n’avait guère accordé d’attention aux administrations. Cet état de fait se comprend à la fois comme le produit d’une émancipation du droit public, auquel l’administration avait été abandonnée comme un " vieil objet ", et comme le produit de cette " exception française " qui, du fait de la majesté traditionnelle de l’Etat et de ses " grands commis ", voyait reconnaître à ceux-ci un magistère, en pratique incontesté, du discours légitime sur l’Etat, ses administrations et leurs réformes.

Ce désintérêt contraste avec un monde anglo-saxon où la " Public Administration " est très prospère, de même que chez nos voisins européens, où l’étude des institutions administratives bénéficie d’un fort rayonnement, et les " academics " qui les étudient aussi — leurs anciens étudiants devenus hauts fonctionnaires les sollicitant souvent comme consultants car la porosité est plus grande qu’en France entre recherche et " milieu décisionnel central ".

Toutefois, un faisceau de facteurs convergents, où se mêlent l’essor de l’analyse des politiques publiques qui, traitant de " L’Etat en action ", l’a donné à voir comme un Gulliver empêtré d’administrations concurrentes, et les effets d’un retour de flamme " néo-institutionnaliste ", a permis la floraison récente de recherches consacrées aux mondes administratifs, en leurs formes différenciées. Au-delà de leur variété, une caractéristique modale de ces travaux est bien que, par leur formation intellectuelle, leur ancrage universitaire, leurs méthodes et leurs cadres d’analyse, ils appartiennent aux sciences sociales, et pour la plupart à la science politique, c’est-à-dire se distinguent d’une approche juridique des institutions. Ces recherches manifestent le souci commun de réinvestir en politistes/politologues le champ de l’institutionnel, en l’espèce celui des institutions administratives — quand d’autres ont opéré un mouvement similaire vers les institutions politico-constitutionnelles. Appréhender ainsi les institutions, c’est s’enraciner dans des études empiriques approfondies qui permettent de saisir " l’épaisseur " des institutions, en leur double dimension d’univers de pratiques et d’univers de sens. Les institutions étant un ordre routinier fait d’histoire objectivée, ces études s’appuient souvent sur une connaissance socio-historique. De plus, comme les institutions administratives ne sont ni abstraites ni inertes, leur étude ne se conçoit pas sans une connaissance approfondie des agents publics qui vivent dans les institutions et leur donnent vie, c’est-à-dire sans une sociologie des acteurs, ni sans des liens à l’évidence étroits avec la sociologie de l’action publique que ces acteurs, en interactions complexes avec d’autres, concourent à produire. Sans exclusive, l’étude politiste des administrations se développe ainsi, à l’articulation entre la sociologie des acteurs et des groupes, la sociologie des institutions, la sociologie du travail et la sociologie de l’action publique, comme un complément susceptible de jeter des ponts nouveaux entre ces spécialités bien établies.

Cette floraison s’inscrit dans le retour d’intérêt grandissant de notre discipline pour les processus de gouvernement (entendu comme l’ensemble des interactions gouvernantes) des sociétés contemporaines et leurs divers " styles de gouvernement ". Or ces processus sont indissociablement politiques et administratifs : l’on constate une ancienne et étroite association qui fait des gouvernants politiques et des " fonctionnaires gouvernants " des associés-rivaux dans l’entreprise de revendication d’une autorité légitime sur " la société ". Les recherches consacrées aux administrations donnent à voir cette imbrication, bien sûr différenciée en ses formes et son intensité selon les pays, les époques, les niveaux territoriaux et les secteurs, entre les sphères d’activités dites " politiques " et dites " administratives ". C’est pourquoi ces recherches font partie pleine et entière de la science politique comme science sociale des processus de gouvernement — affirmation novatrice de ce côté-ci de la Manche alors qu’elle est au Royaume-Uni une évidence partagée.

 

Un Groupe " Science politique comparée des administrations ", pour quoi faire ?

L’objectif du Groupe est le développement des recherches sur les institutions administratives. La méthode sera de se placer résolument sous le signe de l’ouverture interculturelle et du comparatisme européen. En effet, la littérature anglophone est riche en débats stimulants auxquels il est bon que les politistes français prennent part, tant pour ce qu’ils peuvent en retirer qu’y apporter. De plus, dans un contexte d’européanisation où les administrations nationales participent aux dynamiques bruxelloises et ont un rôle grandissant de mise en oeuvre des politiques communautaires, pratiquer l’administration comparée s’impose pour analyser les dynamiques de convergence partielle et/mais de différenciation maintenue, voire renouvelée, entre Etats.

Maints pays d’Europe ont mis en place des réformes d’autonomies régionales, de " dévolution ", de décentralisation. Le projet est de développer une comparaison " horizontale " entre les formes de structuration institutionnelle et les modes d’administration de ces entités infra-étatiques aux pouvoirs croissants. Un autre comparatisme horizontal a trait au milieu décisionnel central : les administrations étant différenciées et rivales, il importe d’interroger les ressemblances et dissemblances de leurs modes d’organisation et de fonctionnement. D’autant que le réformisme administratif des dernières décennies s’est traduit par la création et la montée en nombre, aux côtés du traditionnel département ministériel avec ses directions générales, de formes institutionnelles différentes : autorités administratives indépendantes de régulation, agences exécutives, structures de coordination interministérielle du " core executive ". Enfin, des comparaisons " verticales " exploreront, en un jeu d’échelles entre " layers of government ", les traits communs et les particularités des modes d’administration municipaux, intercommunaux, provinciaux/départementaux, " régionaux " ou équivalents, nationaux et européen communautaire.

Par le truchement du comparatisme, il s’agira d’explorer des domaines tels que :


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