Table ronde 2

Comment concevoir et saisir les temporalités du vote ? Pour une approche longitudinale de la décision électorale

Responsables scientifiques :
Bruno Cautrès (CEVIPOF, Centre de recherches politiques de Sciences Po) bruno.cautres@sciences-po.fr
Pascal Perrineau (CEVIPOF, Centre de recherches politiques de Sciences Po) pascal.perrineau@sciences-po.fr

 

Résumés / Abstracts

CAUTRÈS Bruno (CEVIPOF- Centre de recherches politiques de Sciences Po), PERRINEAU Pascal (CEVIPOF- Centre de recherches politiques de Sciences Po)

Les enjeux intellectuels et méthodologiques d’une approche temporelle et longitudinale du vote

Si la plupart des analyses électorales cherchent à expliquer l’orientation du vote, c’est-à-dire le choix de tel ou tel parti ou candidat lors d’une élection donnée et si des débats actuels très nourris continuent sur les clivages sociopolitiques et leur potentiel renouvellement (old / new politics), nous souhaitons innover en décalant le regard et en s’intéressant à la "boîte noire" de la fabrication des choix électoraux, en considérant la question des " temporalités " du vote et en se concentrant sur la décision électorale plutôt que directement sur le choix exprimé. L'approche "longitudinale" de la décision électorale entend chercher à comprendre comment la décision de voter et le choix exprimé s’inscrivent dans un rapport de long terme aux élections et à la participation politique, comment elles sont influencées – ou pas – par les campagnes électorales, comment les facteurs de long terme et de plus court terme se renforcent ou s’opposent, quelles sont les dimensions cognitives et affectives qui jouent au moment de l’arbitrage entre différentes possibilités de vote. Comment, en fait, se forment les jugements politiques qui conduisent aux décisions de vote ? Cette communication introduira la table ronde en proposant une réflexion sur les enjeux intellectuels et méthodologiques d’une approche temporelle et longitudinale du vote.

Intellectual and methodological issues in temporal and longitudinal approach of voting

If most of the electoral analyses try to explain the orientation of the vote, that is the choice for such or such party or candidate during a given election and if current debates continue on the sociopolitical cleavages and their potential renewal (old / new politics), we wish to innovate by being interested in the "black box" of the "crafting" of the electoral choices, by considering the question of voting temporalities and on focusing on the process of electoral decision.
The "longitudinal" approach of the electoral decision intends to understand how the decision to vote and the expressed choice joins a long-term relationship to the elections and to political participation,
how they are influenced - or not - by election campaigns, how the long-term factors and the short term factors strengthen or oppose, which are the cognitive and emotional dimensions which play at the time of the arbitration between various possibilities of vote. How, in fact, form the political judgments which drive to the decisions of vote? This communication will introduce the round table by proposing a reflection on the intellectual and methodological issues in a temporal and longitudinal approach of the vote.

BRÉCHON Pierre (PACTE-IEP de Grenoble)

Les facteurs explicatifs de l’abstention : quelles relations entre abstention et processus d’individualisation sur une longue période ?

On a souvent opposé ou au moins mis en tension les explications de type social (le déficit d'intégration sociale expliquant l'abstention) et les explications d'ordre politique (l'abstention exprimerait une attitude politique de rejet à l'égard de toute la classe politique ou à l'égard de l'offre politique présente à une élection particulière). J'ai parfois essayé d'expliquer qu'il y avait désormais aussi une tendance à la montée de l'abstention qui pouvait être liée à l'évolution longue des valeurs et notamment à la montée de l'individualisation, définie comme une volonté de choisir soi-même son agir sans s’en remettre à des autorités supérieures contraignantes.
Cette communication entend tester de manière systématique quels sont les facteurs explicatifs de l'abstention, et plus spécifiquement essayer d'opérationnaliser les relations entre abstention et individualisation. L'idée générale étant que l'abstention intermittente est souvent liée à un manque de "bonnes raisons" d'aller voter. Le clivage générationnel très fort sur les niveaux de l'abstention va dans ce sens. Les jeunes voteraient souvent moins, non pas parce qu'ils seraient dépolitisés ou parce qu'ils ne seraient pas encore bien insérés dans la société, mais surtout parce qu'ils veulent être sûrs de faire un choix ayant du sens. Les données qui seront utilisées pour cette démonstration sont : les enquêtes électorales passées et présentes mais aussi peut-être l’enquête Démocratie 2000 et l'enquête ISSP 2004 sur la citoyenneté.

The explanatory factors of non participation : what relationship between non participation and the process of individualization on a long way ?

Social explanations (abstention explained by the lack of social integration) and political explanations (abstention as a political attitude of rejection of the whole political class or of the political supply in a given election) are very often opposed or at least strained by political scientists. Sometimes I have tried to explain the tendency to a rise of abstention by the evolution of values on a long time, particularly the rise of individualization defined as the will to choose oneself his action without any determination by constraining authorities and powers.
This communication intends to more systematically test what are the explanatory factors of non participation, and more specifically how to operationalize relationships between abstention and individualization. The general idea uphold is that the intermittent abstention is often linked to a lack of "good reasons" to go to vote and turn out. The very strong generational cleavage concerning the levels of abstention is so explained. The young would vote less often, not because they would be depoliticisized or because they would be less integrated in society, but essentially because they want to by sure to do a good choice with a strong meaning. For this demonstration we will use the past and present French electoral surveys, and perhaps the 2000 democracy survey and the 2004 ISSP survey on citizenship.


COMTAT Emmanuelle (PACTE-IEP de Grenoble) et SAVARESE Eric (Université de Perpignan- CERTAP)

Les pieds - noirs et le vote Front National. Regards sur le modèle du " traumatisme historique "

Des travaux récents ont permis de mettre en évidence la diversité sociale, religieuse et politique des rapatriés. On analyse dans quelle mesure le passé traumatique influe sur le positionnement à l’extrême droite d’une partie des pieds — noirs et de leurs enfants. Pour comprendre les logiques du vote FN dans ce groupe, on réinterroge les travaux de P. Bois sur la genèse et les effets politiques d’un " traumatisme historique ". La mémoire de la guerre d’Algérie est en effet chargée d’éléments traumatiques susceptibles d’agir sur les valeurs, les attitudes politiques ou les orientations partisanes des pieds — noirs, et plus généralement sur leur rapport à la politique. Le modèle du " traumatisme historique " permet-il d’expliquer ce vote ou est-ce que les variables sociodémographiques demeurent explicatives comme chez la plupart des Français ?
Après avoir isolé les effets d’un " traumatisme historique " sur le vote front national chez des pieds — noirs, il convient d’observer comment ils s’exercent. Si le rejet de l’immigration maghrébine reste l’explication régulièrement avancée par les acteurs interrogés, ledit rejet ne suffit pas, à lui seul, à expliquer le choix du parti frontiste dans les urnes — même s’il rend compte de l’orientation probable du vote en terme de clivage droite / gauche. Les pieds — noirs qui votent front national sont ainsi, parmi ceux qui observent avec défiance l’immigration maghrébine, ceux qui associent cette immigration à la présence, sur le sol de l’ancienne métropole, de leurs anciens ennemis : les fellagas. D’où l’expression dans les urnes des effets d’un traumatisme de guerre qui permettra de discuter de la valeur heuristique du travail de Paul Bois.

Pieds - noirs front national's vote. A re-examination of historical  traumatism model

Recent researches allowed us to observe pieds — noirs ‘social, religious and political diversities. We propose to analyse how the traumatic past has an influence on extreme right opinion of certain members of this group. To understand pieds — noirs’ political behaviours, we use, in an Algerian war context, P. Bois’s theory about historical traumatism and political effects. Algerian war memory is full of traumatic events which can have effects on repatriates’ political values and on repatriates’ political behaviours. Can we explain in this group extreme right opinion with historical traumatism model or with social and economics model ? We propose to observe the effects of this "historical traumatism" on pieds — noirs front national’s vote. The repulsion of the immigration from the maghreb is often quoted by concerned people who are questioned about this subject. But this reason can’t be the only one to explain the Front National’s vote, even if it gives informations about the right / left cleavage of the vote. Pieds — noirs who vote for the front national reject the immigration from the maghreb and associate this immigration with the presence of their former enemies, nowadays in France, the "fellagas". So the traumatism of war express itself throught a typical vote and allow us to study the heuristic value of Paul Bois ‘s work.


FRANKLIN Mark (European Institute, Florence)

Les bases générationnelles du changement partisan de longue durée

Si les alignements partisans et les loyautés des électeurs dans les pays occidentaux ne sont plus modelés par les vieux clivages du passé, quelles en sont les implications du point e vue d’une compréhension du changement politique contemporain? Une possibilité consiste en ce que des entrepreneurs politiques ont maintenant l'occasion d'encourager le développement des nouveaux clivages qui vont jouer à présent le rôle qu’avaient joué les clivages identifiés par Lipset et Rokkan dans les années 1960. Cette communication souhaite montrer que ce type d’évolution n’est possible à identifier que si l’on redéfinit la notion de clivage politique telle que Lipset et Rokkan l’avait définie. Le concept de clivage politique comme quelque chose de plus qu'une simple différence d'opinions sur la politique gouvernementale, peut valoir la peine d’être conservé à condition d’établir en quoi les nouveaux clivages conservent les caractéristiques sociales des vieux clivages particulièrement en ce qui concerne leur capacité à modeler les systèmes de partis contemporains et restreindre la volatilité électorale que l’on constaterait sinon.

Cette communication propose une approche théorique pour comprendre le changement générationnel (à long terme) dans les systèmes de partis et des loyautés électorales dans le monde politique contemporain et souhaite éclaircir la différence ce types de changements à long terme et des changements (à court terme) plus provisoires. Pour mener à bien cette démonstration, on prendra appui sur des élections récentes en Europe et l'Amérique du Nord.

The generational basis of long-term change in party support

If party alignments and voter loyalties in western countries are no longer molded by the cleavages of past centuries, what implications does this have for contemporary political change? One possibility is that political entrepreneurs now have the opportunity to encourage the development of new cleavages that will serve the function in today’s political world that Lipsett and Rokkan’s cleavages served in the world of the 1960s. This paper will argue that such developments are only possible to the extent that we redefine the concept of a political cleavage from what Lipsett and Rokkan had in mind. This may be no bad thing to do. The concept of a political cleavage as something more enduring than a mere difference of opinion about government policy may well be worth retaining, but in that case it is important to establish in what ways these new cleavages retain the characteristics of the social cleavages of old, particularly in regard to their ability to mold contemporary party systems and restrain the amount of political volatility that would otherwise be present. This paper develops the theoretical basis for understanding generational (long-term) change in party systems and voter loyalties in the contemporary political world, and the distinction between such long-term change and more temporary (short-term) changes, using examples from recent elections in Europe and North America.


TIBERJ Vincent (CEVIPOF- Centre de recherches politiques de Sciences Po)

Des votes (a)partisans: les élections présidentielles dans l’ère des recompositions partisanes

Le modèle de Michigan est l’un des modèles du vote à la fois parmi les plus anciens et les plus reconnus dans la science politique internationale. Bien que traduit imparfaitement et critiqué dans le cas français (Converse, Pierce 1986, Lewis-Beck, Belanger, Chiche, Tiberj, 2006), sa version hexagonale reste cependant un des outils majeurs dans l’étude de l’électeur français avec le modèle des variables lourdes (Michelat et Simon, 1977) ou l’économie (Lewis-Beck 1997).
Pourtant la recomposition idéologique de l’espace politique français (Grunberg et Schwesiguth, 1997, Chiche, Le Roux, Perrineau, Rouanet, 2002), les phénomènes de réalignements et de désalignements induits par le Front National (Mayer, 2002) et le renouvellement générationnel mette le lien partisan "sous pression " (Chiche, Haegel, Tiberj, 2002, 2004) : montée du vote non-conforme, hésitation croissante, instabilité de la proximité partisane. Doit-on alors conclure à l’ère des partis sans
partisans ?
Dans cette intervention, nous souhaitons reconsidérer la notion de lien partisan à la lumière des évolutions électorales depuis 1988, en démontrant l’intérêt d’une nouvelle approche de la relation électeur / parti à travers le concept d’ " espace des possibles électoraux " : les électeurs continuent d’utiliser les partis dans leurs cognitions politiques mais selon de nouvelles logiques (vote expressif, vote d’influence), mêlant plusieurs rapports aux partis (que l’on peut classifier selon la tripartition, partenaires, adversaires, ennemis, voir Tiberj, 2006). Nous évaluerons ce rôle extensif des liens partisans, dans l’économie du choix électoral de 2007 en le confrontant notamment aux modèles conjoncturels que sont les enjeux et les effets candidats (Wattenberg, 1991). Pour se faire nous nous réfèrerons au données du BPF 2006-2007 et du PEF 2007.

(Non) partisan votes : the presidential elections in an era of partisan recompositions

The Michigan model is one of the oldest and most aknowledged voting model in international political science. Although translated imperfectly and criticized in the French case (Converses, Pierce 1986, Lewis-Beck, Belanger, Meager, Tiberj, on 2006), his hexagonal version remains however one of the major tools in the study of the French voter with the model of the "heavy" variables (Michelat and Simon, on 1977) or the economy (Lewis-Beck on 1997).
Nevertheless the ideological reorganization of the French political space (Grunberg and Schwesiguth, 1997, Chiche, Le Roux, Perrineau, Rouanet, 2002), the phenomena of realignments and dealignements led by the National Front (Mayer, 2002) and the generational renewal puts the partisan link "under pressure" (Chiche, Haegel, Tiberj 2002, 2004) : raising of the non-conform vote, increasing voting hesitation, instability of the party proximity. May we conclude that it is the era of the parties without partisans?
In this paper, we wish to reconsider the notion of partisan link in the light of the electoral evolutions since 1988, by demonstrating the interest of a new approach of the relation voter / party through the concept of " space of the electoral possibles "
The voters continue to use the parties in their political cognitions but according to new logics (expressive vote, influence vote) mixing several relationships to the parties (that we can classify according to the tripartition, the partners, opponents, enemies, see Tiberj, 2006). We shall estimate this extensive role of the partisan links, in the economy of the electoral choice of 2007 notably by confronting it with the cyclical models that are the stakes and the effects candidates (Wattenberg, 1991). We shall use data of the BPF on 2006-2007 and of the PEF on 2007.


JADOT Anne (Chargé d’études électorales au Ministère de l’Intérieur)

Les attitudes des citoyens vis-à-vis de l’acte de vote et des élections. Une approche qualitative comparée France / Angleterre

Cette communication, fondée sur une thèse, étudie le temps long de la socialisation aux élections de manière comparée en France et en Angleterre. Grâce à un gros volet qualitatif, il a été montré comment les caractéristiques individuelles, systémiques et culturelles influencent les " dispositions électorales " des citoyens et comment ces attitudes les conduisent à voter (ir)régulièrement. Dans ce papier, 3 résultats seront pointés :
- des discours différents existent dans les deux pays sur la valeur symbolique / utilitariste du vote. Ce " (dés)investissement participatif " peut être éclairé par l’histoire du suffrage universel, la règle électorale et l’encadrement matériel du vote. Compte aussi la socialisation politique par la famille et l’école.
- pour décrire les " affinités électives " à l’égard des élections, une typologie commune aux deux pays a pu être établie malgré les différences objectives entre les scrutins. Celles-ci jouent en effet indirectement, en induisant ou pas une personnalisation des postes électifs et selon le niveau territorial en jeu. La vision affective et évaluative du lien représentatif compte donc plus que la cognition politique. Importent aussi l’appartenance générationnelle et l’ancrage territorial.
- ensemble, se renforçant ou bien se compensant, ces deux attitudes influencent les itinéraires de participation, de l’abstention constante au vote habituel. Mais ce n’est pas un déterminisme absolu, des facteurs de court terme peuvent (dé)mobiliser.

How ordinary citizens assess the electoral process. A qualitative approach in France and England

This paper deals with the long-term socialisation of citizens to elections in France and England. Based on a doctoral thesis, especially on qualitative in-depth interviews, attitudes towards elections and voting are shown to depend on individual, systemic and cultural characteristics. These attitudes, in turn, influence citizens’ propensity to turn out more or less frequently. In the paper, 3 points will be emphasised:
- different discourses on the symbolic / utilitarian value of the act of voting exist in the two countries. This can be linked to their respective enfranchisment process, electoral rules and practical voting arrangements. Political socialisation within the family and at school also matters.
- to present citizens’ attitudes towards elections, a typology common to both countries has been built in spite of objective differences. Elections characteristics indeed have only an indirect impact, in so far as they tend to personalise (or not) offices and depending on the territorial level at stake. Thus affective and evaluative assesment of the link between voters and their representants matters more than political cognition. A generational gap and the sense of belonging to a place have also been pointed.
- either reinforcing or balancing each other, these two latent attitudes together explain participatory routes, from frequent abstention to habitual voting. However, this predisposition is not fully deterministic since short-term factors can (de)mobilise voters.


FISHER Stephen (University of Oxford, Department of Sociology)

L’analyse des dynamiques électorales à travers les enquêtes Bristish election studies : un état de l’art

Cette communication présente un état de l’art des principaux résultats et choix méthodologiques opérés par les enquêtes britanniques électorales, notamment les enquêtes Bristish election studies mais aussi les enquêtes British Election Campaign Panel Studies et British Household Panel Study qui comportent des questions d’opinions politiques. Cette communication proposera un tour d’horizon des travaux d’analyse du comportement électoral et du vote basés sur ces enquêtes et évaluera les principaux enseignements que l’on peut retirer de l’expérience britannique en ce domaine.

Election analysis and British panel data: a review

This paper describes the structures of the various British Election Panel Studies, including the British Election Campaign Panel Studies and the British Household Panel Study, which also has political questions. The paper also reviews the academic work on electoral behaviour that has used British panel data, and assesses what has been learnt from these particular data sources.

 

GERSTLÉ Jacques, (CRPS – Université de Paris 1), PIAR Christophe, FRANCOIS Abel (LARGE, Université Robert Schuman et Télécom Paris, Dép. SES)

Les effets d’information sur le vote

Les élections présidentielles de 1988, 1995 et 2002 ont montré des effets d’information puissants au cours des campagnes. Par ce concept nous désignons l’impact de la couverture informationnelle sur le public qui peut prendre différentes formes : effet d’agenda, de cadrage et d’amorçage. Par effet d’agenda nous désignons le pouvoir des médias de définir les enjeux principaux de l’élection. L’effet de cadrage concerne deux manières différentes d’influencer le public : la première en présentant un thème, un candidat ou un objet politique en général en sélectionnant l’une de ses dimensions particulière au détriment des autres; la seconde en imputant la responsabilité d’une situation à un acteur quelconque. Dans l’effet d’amorçage la présentation d’un état de la situation amorce les critères de jugement utilisés pour juger un candidat, par exemple.
L’observation de l’information diffusée distingue entre information électorale et information non-électorale et les effets d’information passe très souvent par la seconde pour imposer des thèmes et enjeux à la considération du public. En fait les effets d’information concernent le contrôle de l’attention publique auquel les stratégies de communication sont en général dédié.
On analysera la couverture informationnelle des élections de 2007 que l’on croisera avec les données recueillies au niveau national par le Baromètre Politique Français et le Panel Electoral Français et avec les données recueillies au niveau local par la recherche sur la formation du jugement politique.

Information effects on the vote

For the presidential elections of 1988, 1995 and 2002 in France we could observe different information effects at work in the campaign. By such a concept we cope with the impact of news coverage on the public that can take different forms like the agenda effect, the framing effect or the priming effect. The agenda effect refers to the power of the news media to define the main issues of the election; the framing effect can address two different ways of influencing the people: the first one is the way of presenting a special theme, candidate or political object in general by selecting particular dimensions to the detriment of others; the second one concerns the power of the media to attribute the responsibility of a situation to somebody; the priming effect means that a state of problems defines the criteria used by the people to assess the candidates, for example.
The observation of the news distinguish between election news and non-election news and the information effects follow very often the non-election news line to impose specific themes or subjects to the public consideration. In fact the information effects are concerned by the control of public attention to which the communication strategies are devoted.
We will analyze the news coverage of the 2007 elections and will work with the data gathered at the national level by the Baromètre Politique Français, the Panel Electoral Français and the data gathered at a more local level by the research on the formation of political judgement.


MARIE Jean-Louis (Triangle – IEP de Lyon)

La psychologie politique questionnée par les sciences cognitives

La psychologie politique emprunte de plus en plus aux sciences cognitives. Inversement, celles-ci viennent sur les questions de l'analyse électorale et des comportements politiques. On commencera par dresser un état de ces échanges. On verra ensuite que les sciences cognitives adhèrent au paradigme du traitement de l'information et développent une perspective naturaliste, c'est à dire matérialiste et évolutionniste. Sur cette base elles suggèrent que les variables temporelles actuelles produisent nécessairement leurs effets dans le cadre de dispositions, aptitudes et attentes naturelles constituées dans un temps très long : celui de l'évolution. De même, les dimensions cognitives et affectives intriquées dans la décision électorale sont éclairées par tous les travaux sur les limites de ce que le cerveau humain peut percevoir, stocker et computer, sur les mécanismes largement automatiques de réduction des dissonances, sur les processus d'attribution très partiellement contrôlés
On examinera ce que la psychologie politique conserve réellement des propriétés fondamentales des sciences cognitives. Ces propriétés sont-elles compatibles avec le modèle explicatif de la psychologie politique comme science sociale? On verra comment les résultats des sciences cognitives éclairent (confortent ou déstabilisent) concrètement les travaux de la psychologie politique en matière de choix électoral.

The questioning of political psychology by cognitive sciences

Lately, political psychology has been borrowing more extensively from cognitive sciences. Conversely, the latter have entered the field of election analysis and of political behaviors. The paper will start with an evaluation of those interactions. We will then argue that cognitive sciences accept the paradigm of information processing and develop a naturalist perspective, that is to say both evolutionist and materialist. From that standpoint, they maintain that the present temporal variables necessarily have an impact within the framework of natural abilities, aptitudes and expectations which are constituted over an extended time-frame, that of evolution. Similarly, the cognitive and affective dimensions which are an intricate part of electoral decisions are explained by the literature on the limits of what the human brain can perceive, stock and compute, on the largely automatic mechanisms of dissonance-elimination, on attribution processes that are only very partially controlled.
We will examine what political psychology really retains from the methodology of cognitive sciences. Is this methodology compatible with the explanatory model of political psychology as a social science? How do the conclusions of cognitive sciences concretely enlighten, comfort — or challenge — the results that political psychology applied to election choices arrived at?


GOUARD David (CRPS – Université Paris 1)

Compétence politique, politisation et modes de cognition : une étude diachronique sur Ivry-sur-Seine

A partir de l’investigation de deux cités HLM de la ville d’Ivry-sur-Seine, les Cités Maurice Thorez et Youri Gagarine, espaces témoins de l’ancrage historique communiste dans cette ville restée bastion depuis 1925, il s’est agi de se concentrer sur les électeurs de deux bureaux de vote, en profitant du calendrier électoral national offert pour 2007 et 2008.
Dans cette logique, nous appréhendons les différentes formes d’appropriation du politique, entendues au sens de " bricolage " cognitif, en étant attentif au jeu d’interactions sociales complexes qui se développe entre l’individu et son territoire, analysé sous l’angle de ses compétences en terme de saisie, lecture et interprétation des flux d’informations présents dans son environnement le plus immédiat.
A partir d’une subjectivité propre à chaque résident, façonnée par les différentes expériences socialisatrices et les réseaux de relations tissées et mobilisés, ces interactions viennent alimenter des zones conflictuelles d’un point de vue cognitif, chargées émotionnellement, qui constituent alors une prise d’appui, un point de repère pour émettre et justifier un positionnement politique et, éventuellement, un vote.
En somme, ce travail identifie des formes de compétences politiques différenciées selon le rapport entretenu à l’égard du territoire et de ses identités sociales et politiques, venant participer à la recherche sur la pluralité de la compétence politique.

Political skill, politisation and ways of cognition: a lengthwised study about Ivry-sur-Seine

From an investigating of two cités HLM of Ivry-sur-Seine, Cité Maurice Thorez and Cité Youri Gagarine, representative areas of a historical communist positioning that remained a strong bastion since 1925, we decided to focus on electors of two vote offices, by benefiting of the national electoral calendar of 2007 and 2008.
In this perspective, we try to adopt a different approach of appropriation regarding the politic, as a cognitive tool, and being aware of the complex social interactions developed between the individual and his area, and analysed according to his ability to understand, read and interpret the information’s flow within his immediate environment.
From a singular subjectivity belonging to each resident, shaped by different socialisation experimentations and social networks developed and set up, these interactions will develop some conflictual fields from a cognitive point of view, emotively connoted, and will appear as a stepping stone and a mark when their goal is to pronounce and justify a political positioning and, actually, a vote.
As a conclusion, this survey identifies the shapes of different political skills, according to the relationship with the territory and its social and political identity, and contributing to deal with plural political skills.


DORMAGEN Jean-Yves (CEPEL-Université de Montpellier 1) et BRACONNIER Céline (CEPEL-Université de Cergy-Pontoise)

Pour une approche réaliste des itinéraires de participation et de choix électoral. Interroger dans la durée une population électorale

Il est, on le sait, très difficile de reconstituer des itinéraires de participation et de choix électoral. Cette difficulté réside dans les problèmes soulevés par le déclaratif sur de tels objets. D’une part, les électeurs ont tendance à dissimuler les attitudes et les choix " non conformes " - abstention ou vote pour le Front National, par exemple. D’autre part, la mémoire du vote se révèle particulièrement lacunaire et fragile, tout particulièrement chez les nombreux électeurs entretenant un rapport distancié aux activités politiques spécialisées. C’est pour tenter de remédier à ces difficultés que nous avons établi un dispositif d’enquête dans la durée, localisé dans le quartier des Cosmonautes, à Saint-Denis (93). L’objectif est de reconstituer des itinéraires de participation et de vote dont le niveau de réalisme sociologique soit plus élevé que celui obtenu habituellement. Pour cela, nous avons administré auprès des électeurs de ce quartier un questionnaire sortie des urnes à chaque tour de scrutin depuis le premier tour des présidentielles de 2002. Ce sont ainsi, au total, 13 séries de questionnaires, comprenant les dernières élections présidentielles et législatives du printemps 2007, qui serviront de base de données à l’analyse longitudinale des comportements électoraux en milieu très populaire que nous présenterons à l’occasion du congrès de Toulouse.
L’analyse de ces questionnaires sera articulée à celle des listes d’émargements du bureau de la cité. Ce dispositif d’enquête aboutit à une pannelisation sui generis de fait d’un groupe d’électeurs étudiés dans la durée, au sein de leur environnement et au moment même où ils viennent de produire leurs votes. La solidité des données sur lesquelles repose cette étude résulte principalement du fait que les déclarations de vote sont recueillies directement à la sortie du bureau et ne font pas appel à la " mémoire " des électeurs. Les biais de sélection et éventuellement de déclaration peuvent être contrôlés puisque l’on dispose d’une population de référence composée de l’ensemble des électeurs du bureau. Cette étude longitudinale devrait permettre de reconstituer des itinéraires de participation et de vote d’un niveau élevé de réalisme sociologique et ainsi de mieux comprendre l’abstentionnisme (constant et intermittent) mais aussi les logiques de production des choix d’un tour de scrutin à l’autre.

For a realistic approach voting and participation histories. The long-term investigation of an electoral population

Reconstructing voting and participation histories is a known problem due to the limited quality of declarations and accounts on such matters. While some voters tend to conceal attitudes and choices that do not "fit" - such as not participating or voting for the Front National — , recall of past votes often appears to be deficient and weak, especially for voters whose relation to specialised political activity is distant. In order to address these difficulties, we decided to conduct a longitudinal investigation in the "Cosmonautes" neighbourhood in Saint-Denis (93). Our aim was to reconstruct participation and voting histories that would benefit from a greater sociological realism than usual. In order to do so, we made exit poll questionnaires at every round of each ballot since the initial round of the presidential election in 2002. 13 series of questionnaires will have been gathered, including data on the last presidential and legislative elections of 2007. They will provide the database for a longitudinal analysis of voting behaviours in lower status communities presented before the conference in Toulouse.
This questionnaire analysis will be complemented with data from the register of electors in the neighbourhood. The method of investigation leads to the analysis of a sui generis panel of voters, studied in the long term, within their environment and just after the electoral act. The quality of data in our study is essentially due to the fact that accounts are gathered directly just after the vote and thus do not rely on voters' memory for their vote. Biases due to selection (or misrepresentations) can also be controlled since we have data on a reference population: the population who votes in this particular neighbourhood. This longitudinal study should enable us to reconstruct participation and voting histories with a great sociological realism and consequently give some insights on non-participation (be it constant or intermittent) as well as on the logics of production of choice from one round of ballot to the next.


ABRIAL Stéphanie et DENNI Bernard (PACTE — IEP de Grenoble)

Les raisons du vote au prisme de l’environnement social et de la vie quotidienne de l’électeur

Les enquêtes du programme " Formation du Jugement Politique " de Pacte — Grenoble se composent de deux sondages téléphoniques réalisés par BVA début février et mi avril et d’une soixantaine d’entretiens qualitatifs. Toutes ces enquêtes sont réalisées dans quatre territoires très contrastés de l’Isère. Ce protocole semble bien adapté pour saisir la formation du choix électoral dans le contexte de la présidentielle de 2007, marqué par un intérêt élevé pour la campagne et une forte hésitation des électeurs. Selon la méthode du vote probabiliste, début février, un quart des interrogés sont " déterminés " à voter pour un candidat, la moitié sont des " hésitants " : ils donnent des probabilités fortes (supérieures à 5) de voter pour au moins deux candidats ; un quart sont des " indécis ". Dans la deuxième enquête, cet indicateur devrait enregistrer la cristallisation du choix électoral juste avant le premier tour. Les chevauchements entre les électorats — très importants en février - apporteront des informations précieuses pour le second tour. En permettant de travailler sur ces territoires, à partir de statistiques sociales et électorales, de données de sondages et d’entretiens qualitatifs, le protocole offre une large palette d’outils pour analyser ces dynamiques et évaluer les effets des variables lourdes, des données contextuelles (milieu de vie, histoire électorale) et de la conjoncture politique : opinions sur la campagne, ses enjeux et image des candidats.

The motivations of voting, daily life and social environment

The Grenoble survey on the making of public judgment is divided in two parts: telephone interviews supervised by a polling institute (BVA) in early February and mid April, on the one hand; plus some sixty face-to-face in depth interviews, on the other hand. Respondents live in four dramatically different constituencies within the same county (Isère). This research protocol seems very well suited to the understanding of voting behaviour during the presidential election of 2007, characterized by a high interest in the electoral campaign and high hesitation among voters. Using a new technique to assess likely votes we measured the "voting probabilities" of each respondent for each candidate: while a quarter of the respondents displayed a strong motivation to vote for their preferred candidate, half of them were still hesitating several weeks before the election (their probabilities to vote for two different candidates or more are superior to 50%). In the second wave (the qualitative survey) this indicator should record the electoral crystallization of the opinions on the eve of Election Day. Since the February findings point out a great overlapping between electorates, the April survey should complete our knowledge of the various movements between electoral preferences. This methodology relies on an equal concern for social neighbourhoods and social capital, as well as sociodemographics, local history, past elections, and political conjuncture. It helps capturing public opinion on the political campaign, the main issues at stake, and the candidates’ image.


CAUTRÈS Bruno (CEVIPOF- Centre de recherches politiques de Sciences Po) et STRUDEL Sylvie (CEVIPOF- Centre de recherches politiques de Sciences Po/Université de Tours)

Les traces du référendum de 2005 dans l’élection présidentielle de 2007

L’enjeu européen " travaille ", depuis le référendum de ratification du traité de Maastricht en 1992, les équilibres sociaux, politiques et partisans français. Quel rôle l’Europe, " invisible mais omniprésente " dans le scrutin de 2002, a-t-elle joué dans l’élection présidentielle de 2007 ? Un " acte lourd " a été posé le 29 mai 2005, lors du vote négatif de la France à l’occasion du référendum portant ratification du traité établissant une Constitution pour l’Europe. " Acte lourd " de par ses significations mais aussi de par ses conséquences tant françaises qu’européennes. Quelles sont les " traces " du référendum de 2005 dans le scrutin de 2007 ? Contrairement à ceux qui voulaient voir dans les résultats du référendum un avatar national, l’Europe est confirmée comme question qui fâche et qui divise. Contrairement à ceux qui présentaient la victoire du "Non" comme la victoire d’un camp politique contre un autre, l’Europe continue de faire sentir ses effets centrifuges à l’intérieur même des ceux-ci. Mais conformément à ce qui a été analysé, le pessimisme économique et social fortement ancré dans l’opinion française et alourdi d’un climat de défiance envers les élites politiques semble bien un fil rouge que l’on peut tirer du 29 mai 2005 au 22 avril 2007 pour rendre compte des fragilités françaises. Nous avions eu, en 2005, un vote sur l’Europe à partir de ses effets sur la France, nous venons d’avoir, en 2007, un vote sur la France avec ses conséquences sur l’Europe.

The traces of the 2005 referendum in the 2007 presidential election

Since the Maastricht Treaty ratification referendum in 1992, the European issue emerged in the French social, political and partisan space. What role did Europe, "invisible but omnipresent" in the ballot of 2002, play in the presidential election of 2007? A significant act was put on May 29th, 2005, during the negative vote of France on the occasion of the referendum carrying ratification of the treaty establishing an EU Constitution. What are the "tracks" of the referendum of 2005 in the ballot of 2007? Contrary to those who wanted to see in the results of the referendum a national adversity, Europe is confirmed as a question which divides. Contrary to those who presented the victory of "No" as the victory of a political camp against the other one, Europe continues to make feel its centrifugal effects inside even of these.
But according to what was analyzed, the economic and social pessimism strongly anchored in the French opinion and weighed down by a climate of mistrust to the political elites seems as a latent dimension which we can pull from May 29th, 2005 till April 22nd, 2007. We had had, in 2005, a vote on Europe from its effects on France, we have just had, in 2007, a vote on France with its consequences on Europe.

 

CHICHE Jean (CEVIPOF- Centre de recherches politiques de Sciences Po) et BOY Daniel (CEVIPOF- Centre de recherches politiques de Sciences Po)

Dynamiques de campagne électorale et images des candidats à l’élection présidentielle de 2007

Parmi les possibles déterminants du vote lors d'une élection présidentielle, la question de "l'image des candidats" est désormais considérée comme une problématique intéressante de plusieurs points de vue. D'abord parce que l'on s'interroge sur les mécanismes de production de ces images (les images sont elles liées aux variables sociodémographiques et/ou aux proximités idéologiques des individus) ensuite parce que l'on cherche à évaluer la capacité d'explication de la décision électorale produite par ces images (avoir une "bonne" image d'un candidat suffit il à induire la décision électorale indépendamment des autres déterminants sociodémographiques ou idéologiques). Envisagée dans la dynamique d'une campagne électorale la question des images devrait répondre à une série d'autres questions. Les qualités attribuées aux candidats sont elles des "données de base" induites par le choix du candidat et, par là relativement invariables tout au long de la campagne ? Ou bien ces qualités sont elles des constructions, alimentées par des éléments de connaissances fournis au cours de la campagne ? Il est évidemment possible de faire l'hypothèse d'une coexistence entre "images fixes" et "images mouvantes" selon que les électeurs se situent dans des modes de rapports au politique différents : trouve t-on des électeurs plus intéressés par la campagne, plus exposés aux médias qui construiraient leurs images en puisant dans des éléments d'information fournis par la campagne, s'opposant à des électeurs plus passifs dont le choix électoral s'accompagne d'une "image de candidat" constituant une sorte de "pré-jugé" relativement invariable ?

Electoral campaign dynamics and candidates images in the 2007 French presidential election

Among the possible voting determinants during a presidential election, the question of "the image of the candidates" s henceforth considered as an interesting problem of several points of view. At first because we wonder about the mechanisms of production of these images (are the images connected to sociodemographics and/or to the ideological proximities of the voters ?), then because we try to estimate the capacity of explanation of the electoral decision produced by these images (is it enough to have a "good" image of a candidate to infer the electoral decision independently of the other determiners socio demographics or ideological variables?).
Envisaged in the dynamics of an election campaign the question of the images should answer a series of other questions. Are the qualities attributed to the candidates a kind of "source data" inferred by the choice of the candidate and so relatively invariable throughout the campaign ? Either are these qualities constructions, build on elements of knowledge supplied during the campaign ? It is obviously possible to make the hypothesis of a coexistence of "fixed images" and "unstable images" as the voters are situated in different relationships to politics : do we find voters more interested in the campaign, more exposed to the media that build their images by drawing from elements of information supplied by the campaign, opposing to more passive voters whom the electoral choice comes along of a "image of candidate" establishing a kind of relatively stable prejudice ?


ROZENBERG Olivier (CEVIPOF-Centre de recherches politiques de Sciences Po)

Comment les raisons du vote évoluent-elles avec le temps ? Une enquête longitudinale d’un groupe de discussion (2002-2007)

Deux types d’héritage associé à la décision de vote sont spécifiquement considérés. L’électeur prend-il en considération au moment de voter, le bilan de la majorité sortante d’une part, et de ses choix électoraux passés d’autre part ? L’enjeu théorique de ce questionnement renvoie à l’intégration de la dimension temporelle au sein du modèle explicatif du choix électoral inspiré de la théorie économique du vote. De nombreux travaux ont fait la démonstration des limites voire des apories de la théorisation proposée par A. Downs. A cet égard, la variable temporelle renvoie-t-elle à un système d’explication alternatif, à l’instar du civisme ou de l’habitus, ou s’intègre-t-elle à une conception utilitariste du vote ? Cette dernière hypothèse invite à penser la rationalité, non plus du seul vote, mais des trajectoires et des parcours électoraux.
Afin de saisir l’évolution dans le temps des raisons du vote, l’intervention s’appuie sur un dispositif d’enquête longitudinal centré sur huit citoyens français ordinaires. Ces personnes ont été réunies dans le cadre de plusieurs groupes de discussions en 2002. Elles ont été à nouveau sollicitées lors des campagnes électorales de 2007. Le matériel ainsi constitué permet de saisir les trajectoires de vote de ces personnes de 2002 à 2007, et les justifications qui y sont associées.

How the voting motivations evoluate with time ? A longitudinal survey of a discussion group (2002-2007)

This communication questions the temporal evolution of electoral choices by focusing the analysis on the notion of rationality of the voter and by using an experimental material based on the follow-up of several trajectories of vote between 2002 and 2007.
Two kinds of filiations associated with the vote are specifically investigated. Does the voter draw up a balance sheet of the incumbent majority on the one side and of his/her past electoral choices on the other? The theoretical issue associated with this questioning lies in the capacity to integrate a temporal dimension to the explanatory model inspired from the economic theory of voting. Several works have pointed to the limits of the theory originally formulated by Anthony Downs. On that ground, should the temporal variable be regarded as an alternate explanatory variable — such as public-spiritedness or /habitus/ — or can it be integrated to an utilitarian conception of vote? This last hypothesis suggests that the rationality of trajectories of vote (rather than single votes) should be considered.
In view of studying the temporal evolution of voting behavior, this communication is based on a longitudinal study of height ordinary French citizens. Those persons participated to several groups of discussion in 2002. They have been once again interviewed during the electoral campaigns of 2007. This original material enables to capture the individual trajectories of vote from 2002 to 2007 and the discursive justifications for them.


ROY Jean-Philippe (LERAD- Université de Tours)

DESIRS D'AVENIR, un dispositif d’accompagnement ou d’anticipation des effets d’information en politique ?

Au lendemain de sa désignation comme candidate du parti socialiste, on pouvait penser que le site " désir d'avenir " avait joué, pour S. Royal, un rôle important. Conçu comme un forum d'expression citoyenne, il permettait de faire émerger cette démocratie d'opinion, face à la démocratie de parti. Ainsi, indiscutablement, les échanges qui ont eu lieu au sein de ce " lieu virtuel ", ont permis à S. Royal de s'émanciper du cadrage idéologique. Elle a pu, de cette manière, " donner un coup de vieux " à ses challengers, et remporter clairement la bataille de la candidature.
A partir de janvier, dans la " phase d'écoute ", démocratie virtuelle et démocratie réelle se sont mélangés. Le dispositif " désir d'avenir " n'est plus alors qu'un lieu, parmi les autres, de la démocratie participative. Par ailleurs, la candidate désignée, est désormais face à des challengers qui sont entrés dans la dramaturgie de campagne. L'atout décisif de " désir d'avenir " semble s'estomper alors que le lieu du combat politique devient l'arène médiatique et que la compétition s'organise entre équipes de campagne et entre candidats.
A partir d'une étude du site et de la campagne socialiste, on tentera d'évaluer l'usage stratégique du site participatif par la candidate. On tentera de constituer une analyse diachronique de cet usage et de son évolution. On tentera ainsi de mesurer en quoi il a pu participer à l'agenda de la campagne, en quoi, il a pu faciliter, ou non, un cadrage, voire répondre ou anticiper des effets d'amorçage.

" DÉSIRS D’AVENIR ", a support or an anticipation tool of the information effects in politics ?

In the days following Ségolène Royal’s nomination as the candidate of the Parti Socialiste, one could be let to believe that her Désirs d'avenir website was a decisive asset. Considered from the angle of a citizen’s forum, opinion democracy emerged in the place of party democracy. The exchanges inside this cyberspace brought about S. Royal’s emancipation from ideological framing: she was thus able to silence her Socialist challengers, and win the party’s candidacy.
Before January 2007, virtual democracy and real democracy were intermixed; the Désirs d'avenir was no more than another device used for participative democracy. However, the candidate had to counter challenges in the campaign's on-going drama. The decisive asset of Désirs d'avenir became progressively blurred, while political contests took place in the real, media, arena; the competition centred between campaign teams and the candidates themselves.
By examining both the website and the Socialist campaign, we propose an evaluation of the strategic use of Désirs d'avenir as the candidate’s participative website through a diachronic analysis of its use and of its evolution. We try to evaluate how it provided elements of the campaign’s agenda setting, its use for framing and whether it proposed solutions and anticipated the priming effect.


MUXEL Anne (CEVIPOF-Centre de recherches politiques de Sciences Po)

La mobilité électorale : une analyse des trajets de vote des Français durant les consultations du printemps 2007

Le Panel Electoral Français 2007 permet de suivre les trajectoires de vote d’un même échantillon d’électeurs (n=2000) tout au long de quatre scrutins (premier et second tour de la présidentielle, premier et second tour des législatives). Le processus de construction du choix, ainsi que les hésitations et les modes d’arbitrage des électeurs aboutissant à la décision électorale peuvent être observés de façon fine et rapportés à une analyse à la fois structurelle (sociologie des électorats mobiles et stables) et conjoncturelle (poids sur les trajectoires de vote des enjeux et de la campagne, report premier tour/second tour, articulation entre le vote présidentiel et le vote législatif, effets de contexte et de médiatisation…).
Dans une période de forte recomposition politique, où les reclassements électoraux sont importants et participent à une augmentation régulière de la mobilité électorale, où la tentation de l’abstention et du vote blanc ainsi que la part de l’indécision sont importantes, l’approche longitudinale vise à mieux comprendre la diversité du comportement des électeurs et de leurs réponses. Notre analyse dégagera des profils d’électeurs plus ou moins stables, plus ou moins mobiles, et tentera de cerner certains éléments explicatifs des raisons de leur comportement électoral. Par delà elle proposera une réflexion plus générale sur les évolutions du rapport au vote dans la dynamique générationnelle et sur l’émergence de nouveaux référents arbitrant tant les choix électoraux eux-mêmes que les logiques de la participation.

Electoral Mobility : the Voting Trajectories of the French Electorate throughout the 2007 Elections

The French Electoral Panel 2007 allows to follow the voting trajectories within the same sample of voters (n=2000) throughout four ballots (first and second round of the presidential election, first and second round of the parliamentary elections). The process of the electoral decision can be observed very precisely. How voters do make their choices ? How and when do they take their decision ? What are their hesitations ? Will they be stable or not over the period ? Structural and sociological factors are part of the explanation but also contextual ones.
The French electoral context has changed a lot : partisan and political realignments, weakness of the political and ideological identifications, growth of protest voting and abstention, lack of confidence towards politicians. Such a longitudinal approach gives the chance to better understand how this evolution has an effect on the electoral behaviour and on the political responses of an electorate less foreseeable and more volatile than before. Our analysis will show different profiles within the French electorate : stable and mobile, decided and hesitant, systematic voters and intermittent ones, systematic non voters and intermittent ones…More broadly we will wonder about the significations of voting today.

 

DUPOIRIER Elisabeth (CEVIPOF- Centre de recherches politiques de Sciences Po) et FROGNIER André-Paul (Université Catholique de Louvain)

Les temporalités du vote : approche comparée de la France et de la Belgique

Le but de cette communication est d’étudier de manière comparative le moment de la décision électorale, à partir des enquêtes menées en Belgique et en France au cours des dernières décennies. Ces deux cas étant très différents, tant par le régime politique que par la règle électorale, la découverte de tendances communes éventuelles permettrait de donner à ces résultats une validité qui dépasserait les cas d’espèce. L’approche ne sera pas seulement descriptive, mais s’inspirera des hypothèses théoriques sur le comportement électoral. Celles-ci renverront tant aux effets des attitudes et des systèmes de valeurs qu’aux comportements électoraux préalables et aux variables socio-démographiques. .La question des décisions tardives fera notamment l’objet d’une attention particulière, vu les explications contradictoires souvent tenues à ce propos.

On Time and Vote : a comparative approach of France and Belgium

The aim of this communication is to study in a comparative way the moment of the voter’s electoral decision, using surveys conducted in France and Belgium these last decades. These two cases being very different as far as political regime and electoral rule are concerned, results could get more general validity than just for the two cases in question. The approach won’t only be descriptive, but will be inspired by theoretical hypothesis concerning electoral behaviour. These ones will refer to attitudes and values as well as to previous electoral behaviour and socio-demographical variables. Special attention will be devoted to late voter’s decisions, due to the existence of contradictory explanations of this behaviour.