Le premier objectif de ce colloque est d'interroger la validité conceptuelle de cette notion. Par "violences extrêmes", on ne désigne pas en général la violence d'un système politique, qui pourrait par exemple être qualifié de "totalitaire", dans les termes proposés par Hannah Arendt. La notion de "violences extrêmes" tend plutôt à nommer une forme d'action spécifique, un phénomène social particulier, qui paraissent se situer dans un "au delà de la violence". Le qualificatif "extrême", placé après le substantif, marque précisément l'outrance, et donc une radicalité sans bornes de la violence. Dès lors, la notion de "violences extrêmes" sous-entend-t-elle plutôt :

Mais à partir de quel seuil est-on enclin à parler d'une "violence extrême" ? Quel que soit le degré de sa démesure, celle-ci est pensée comme l'expression prototypique de la négation de toute humanité, ceux qui en sont victimes étant souvent "animalisés" ou "chosifiés" avant d'être anéantis. Par delà le jugement moral, il convient de s'interroger sur les circonstances politiques, économiques, culturelles, qui sont de nature à produire de telles conduites collectives.

Une seconde source d'interrogations concerne la position même du chercheur par rapport à un tel objet de recherche. La proximité de ce sujet avec la mort suscite des réactions très diverses qui peuvent aller d'une répulsion légitime à une fascination ambiguë. Il est difficile pour le chercheur de se mettre à distance et de faire preuve de "neutralité scientifique". Le thème des violences extrêmes pose le problème du rapport du chercheur aux valeurs. Peut-on séparer le jugement éthique et la démarche scientifique ? N'a-t-on pas tendance ainsi à nommer "extrêmes" des conduites de violence qui hier n'auraient pas été qualifiées comme telles ? dans quelle mesure les outils et concepts déjà utilisés pour analyser la violence politique en général, sont-ils suffisants pour appréhender les "violences extrêmes" en particulier ?

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